dimanche 10 décembre 2017

Esclave ou invité

L’enfant que vous désirez mettre au monde, sera-t-il votre esclave ou votre invité, ou bien autre chose, mais quoi d’autre ? Sera-t-il là sur la planète sans votre accord ou avec votre accord ? À vous de juger d’après les faits réels. Que ce soit votre enfant ou l’enfant d’un autre, ce sont deux personnes qui l’ont conçu volontairement(?), essentiellement une femme qui le porte, et fabrique à ses risques et périls les mille milliards de cellules qui vont s’agencer automatiquement pour façonner le corps de votre rejeton. Est-il esclave ou invité ? Et globalement pour la même raison, l’enfant de l’autre, quel qu’il soit d’où qu’il vienne dans le vaste monde, est-il votre esclave ou votre invité sur cette planète ? Si vous êtes juge ou juré soyez-le sans émotion sinon vous serez disqualifié.


Nous, la société, avons inventé les mots et leur définition. Les mots délits, crimes, et esclavage ont une définition. Est-ce que la fabrication d’une existence, d’une personne, c’est-à-dire faire un enfant, correspond à l’une de ces définitions ou les trois ? Si un enfant n’est pas l’esclave de ses parents ni celui de la société, alors je suppose qu’il est leur invité et dans ce cas il doit être logé, nourri, sa sécurité et sa santé assurées, mais également j’espère qu’à cet invité vous lui proposerez un beau séjour avec des activités passionnantes. Si ça n’est pas possible, si vous n’êtes pas absolument sur de vous, ne l’invitez pas, je vous le déconseille car il aurait des raisons de vous en vouloir, l’enfant n’ayant pas 15 jours pour refuser le pseudo cadeau que vous lui faites.

Description du monde


D’abord décrivons le monde, c’est-à-dire dans un premier temps le berceau de bébé et ensuite sa future maison qui est la nôtre à tous. Pour moi l’auteur, le monde parait tranquille, laid, mais tranquille, quelques arbres entre les murs ne me rendent pas la beauté détruite. Ma sécurité et la rentabilité valent-elle de sacrifier la sauvage élégance de la nature ? Un moineau vient de se poser sur la rambarde du balcon. La chaufferie vapote une fumée dont je ne suis pas certain de l’innocuité. Puis-je mettre un peu de cyanure dans votre verre d’eau, s’il vous plait ? Un marteau pique inlassablement, pauvre diable. Soleil à gauche, grisaille à droite, le nord est noir, plutôt gris sombre de brume sale, les grues font et défont la ville. Les voisins sont au boulot, payez votre futur aléatoire, moi je survis à la retraite, sorti de cet état d’esclave ajouté au premier celui d’exister pour servir qui ne me quittera qu’à la toute fin, je cogite pour eux.

Ce matin la radio m’a annoncé sans ambages que Jean d’Ormesson est mort à 92 ans, même pas centenaire. D’autres s’envoient des bombinettes à tour de bras, s’estropient et meurent de ces tours de bras là-bas dans ce Moyen-Orient si proche. C’est le grand jeu de démolition, où les enfants, les femmes, les innocents pleurent. Souffrent et pleurent. Souffrent et souffrent encore. Mais ne sommes-nous pas tous innocents d’exister ? Qu’avons-nous à nous faire souffrir les uns les autres sans discontinuer ? Humanité sadomaso !

Un pigeon a remplacé le moineau, il a gonflé son plumage pour l’hiver qui n’est pas encore là sur le calendrier, mais bien là sur le sol gelé blanchi de givre. Lui se fout des bombes lointaines. Il cherche à manger, mais n’a pas de problème existentiel. Moi non plus, mais j’ai résolu la question depuis quelques années déjà, et j’ai un frigo.

La concurrence est rude dans le bac à fleurs où j’ai distribué avec largesse quelques graines. Pigeons et moineaux se volent dans les plumes. Le gros contre le vif. Les hommes eux ont trop froid pour manifester, ils attendront une accalmie de l’hiver sauf coup tordu des législateurs ou du patronat. Les travailleurs sont de la nitroglycérine instable qu’un simple choc peut faire détoner, attention donc au sursaut, à manipuler avec douceur. Douceur toute relative dépendant de la géographie politique.

Les dirigeants du monde aiment bien en général frapper leurs sujets appelés aussi concitoyens, qui aime bien châtie bien. Nous avons des monarques élus qui parfois ont du mal à quitter leur poste, et d’autres non élus appelés dictateurs, il en reste. Ils aiment tous s’équiper militairement, de petits soldats et d’armes sophistiqués afin de farcir de plomb les petits soldats des armées adverses. Et ils sont très adroits pour diriger le petit peuple avec une catégorie artificielle du même petit peuple, la caste des policiers. C’est une méthode pratique. Le peuple cogne le peuple pour le faire marcher dans la direction choisie par le maitre des lieux.

En dehors du maitre des lieux, il y a les quelques maitres de la monnaie, nos chers milliardaires, qui possèdent le monde et possèdent nos bras et notre temps, donc nos vies. Nous les aimons à un point tel que nos démocraties les enrichissent davantage que les royaumes antiques. Ils sont si riches qu’ils paient des sous-fifres pour gérer leurs affaires encore mieux qu’ils ne le feraient eux-mêmes, ces sous-fifres sont comme nos flics. Ce sont les chefs esclaves de nos négriers. Les humains sont tellement futés qu’ils ont trouvé le moyen d’améliorer l’esclavage tout en le masquant et en le rendant légal par ce moyen. L’argent est le vrai maitre du monde, mais nous le savons tous et ne trouvons pas le moyen de nous en passer ou de tempérer nos maitres de la monnaie.

Comme vous le voyez, si vous ne l’avez déjà vu ouvrez les yeux, le berceau-monde est joyeux, prêt à accueillir les 350 000 progénitures humaines du jour fabriquées pour le service des existants. Tant d’évènements heureux devraient rendre heureuse la planète ? Vous connaissez la réponse ! Si j’étais juge des enfants, je ne qualifierais pas la famille d’accueil humaine pour un atterrissage de bébé douceur, mais qu’y puis-je ? À peine la Deuxième Guerre mondiale était-elle terminée que la grande cigogne m’a largué sur le champ de bataille encore rouge de sang et de pleurs.

Conditions d’existence


Passons aux conditions d’existence. Que devra faire bébé pour au minimum survivre, et ensuite pour vivre de façon intéressante ? 

Un pigeon est en tain de frapper au carreau, il réclame des graines supplémentaires, à moins que ce soit la chaleur du foyer. Je vote pour les graines. Avez-vous déjà vu la tête d’un bébé pigeon, un pigeonneau, non ? C’est un monstre tellement affreux qu’il ferait avorter une humaine lui jetant un coup d’oeil ? Je suis certain qu’à l’inverse une pigeonne avorterait d’apercevoir un bébé humain. Dommage pour les humains, ils ne naissent pas dans des œufs à l’extérieur de leur mère, sinon il eut été facile d’avorter en brisant malencontreusement la coquille. Je vous donne l’astuce, on ne sait jamais. Si vous réussissez à bidouiller votre ADN peut-être parviendrez-vous à vous concocter des ailes également. Ça vous a toujours fait rêver de voler, alors pondez, cassez vos œufs, et le pari du dépeuplement sera gagné, ainsi que celui de la dépollution, de la cessation des guerres, du malheur, de la souffrance, de la faim, de la haine, de…

Ce n’est pas de chance pour nos 350 000 bébés aucun pigeonneau n’est apparu devant maman avant la ponte fatale. Ils devront se coltiner, comme les 8 milliards d’enfants existants déjà, le fardeau de l’existence à la solde des parents, des administrations, des patrons, des militaires, et souvent de la Chose inexistante, tant mieux pour elle, qui les surveille d’un œil tout aussi inexistant, je crois qu’on appelle ça un dieu ou une théière. Cette manœuvre s’appelle « comment rouler le pékin pour qu’il se contrôle lui-même en lui faisant croire qu’un Truc le surveille constamment, aux toilettes comme au lit, en train de se torcher ou en train de faire l’amour ? » Autrefois cela servait également à unifier les gens, mais maintenant c’est le contraire. Autrefois il fallait unir pour régner, aujourd’hui il faut diviser pour régner, drôle d’époque ! Près de 100 % de l’humanité est tombée dans le panneau. Je ne vous raconte pas la qualité de l’intellect de ces chers demeurés. Leurs neurones sont certainement en piteux état.

Bébé tête ou biberonne, c’est selon la richesse de la propriétaire de bébé. Ce n’est pas vraiment une propriétaire, mais c’est tout comme. Qu’elle soit débile ou moins la Loi lui donne raison. Elle peut faire autant d’enfançons qu’elle le veut, ce sont ses chiards, qu’elle s’en occupe. Elle peut faire des triplés, même si elle n’a que deux mamelles, personne ne la sermonnera. Ce sont pourtant mes associés, vos associés dès qu’ils apparaissent hors des cuisses de maman, mais vous n’avez rien à dire. Vous payez leur santé et sécurité par les impôts, leur éducation et culture par vos taxes, mais vous n’avez pas votre mot à dire sur la pertinence de leur existence et de ce qui s’ensuit dont vous-mêmes êtes un exemple.

Je connais même des toubibs et des infirmières qui font des enfants tout en côtoyant à longueur de journée des cas désespérés d’enfants mal nés, en couveuse, handicapés de toute part, avortons dégénérés. Et tous ceux qu’ils connaissent bien puisqu’ils les fréquentent quotidiennement, porteurs de gènes bombes à retardement, de cancer à venir, de sclérose, parkinson, alzheimer. Si ces bien éduqués que sont les doctoresses et les infirmiers font des petits alors que l’alarme sonne à toute cloche pour freiner leurs pulsions reproductives, comment les moins alphabétisés pourraient-ils mieux réfléchir à la question essentielle qu’est la reproduction ? Bébé a-t-il demandé à exister ? Je peux vous répondre à sa place qui fut la mienne : non, et c’est un non définitif.

Les plumes sont parties, le soleil éclaire le côté nord, la cheminée éjacule toujours son nuage blanc, et marteau pique à nouveau après la pause de midi. Rappelez-vous le bébé que vous étiez. Non ? Pas de souvenir ? Vous ne vous souvenez pas d’avoir enchainé la chiasse ? C’est une des faiblesses du nourrisson, il faut que le corps s’habitue à la haine du monde contre lui sous toutes ses formes. Vous coupez un ver de terre en deux, ça fait deux vers. Vous coupez une mère de notre Terre en deux, certains l’ont déjà réalisé fœtus de 6 mois y compris, ça n’en fera pas quatre viables. Étonnant, non ? comme aurait dit Pierre Desproges. L’univers s’est diversifié pour produire la souffrance, c’est un parfait sadique. Et dans ce royaume de sadiques, les humains sont rois.

Bébé a les yeux ouverts, bien après les oreilles, maintenant il étudie les trucs de la vie. Son corps lui a été imposé, et plutôt que de remplir son intellect en même temps que le corps est fabriqué, il faut qu’il s’imprègne du monde. Car comme chacun ne sait pas, nous naissons vierges de toutes connaissances, ce qui fait que nous ne pouvons être responsables évidemment de quelque action que ce soit. Bien entendu puisque tout a été imposé à bébé avec l’existence, corps et intellect, contenant comme contenu. Mais c’est pratique, car si vous étiez né dans la préhistoire vous seriez préhistorien, si vous étiez né avec César vous auriez été césarisé, si vous étiez né au moyen-âge vous seriez moyenâgeux, et au siècle des Lumières vous seriez lumineux. En Afrique vous eussiez été africain, selon l’époque pharaon ou scribe, négrier ou esclave, en Asie vous eussiez été Marco Polo ou Gengis Khan, en Australie vous rêveriez avec les aborigènes du serpent arc-en-ciel, probablement le même que celui qui a piqué Ève, vous savez où.

De ses yeux caméras, de ses oreilles micros, de sa peau surface tactile, chérubin capte le monde environnant. Ça se fait tout seul et ce sera pareil quand il aura 5 ans, 10 ans, 20 ans, etc. jusqu’à ce que tout ça se clôture définitivement, existence y comprise. Dans le cerveau un certain processus grandiose se produit, la lumière apparait. Le cerveau est le seul endroit de l’univers où il y a de la lumière. À l’extérieur c’est tout noir. Il n’y a, disent les scientifiques, que des ondes. Et les ondes, ça ne fabrique de la lumière que s’il y a des capteurs et un cerveau. Que la lumière soit ! Proclame la Théière cosmique en fabriquant un cerveau plein de neurones et des ondes pour perturber la bestiole ainsi fabriquée. Donc le cerveau s’active tout seul, réalise des jonctions, connecte tout ça aux myriades de fibres musculaires. Ça se coordonne bien ou mal, ou en général à peu près. Le cerveau étant une boite noire dont vous n’êtes pas le fabricant, mais uniquement l’utilisateur, bien évidemment vous n’êtes pas responsable de ses élucubrations. Mais je vous vois venir. Vous vous dites : si personne n’est responsable, alors comment va-t-on pouvoir zigouiller le voisin qui a volé notre bœuf ?

Ça prend du temps à réaliser la coordination, et bientôt bébé marche sans savoir pourquoi, mais il se pavane sur trois pas alors que papa maman s’esclaffent. Mais papa est probablement au boulot, donc il ne verra pas cette fabuleuse aventure humaine qui commence. Car papa bosse et souvent maman aussi et c’est maintenant la nounou qui enregistre les progrès de bébé. On fait en sorte de payer peu la nounou, ça permet de vivre mieux et sur son dos, sinon ça ne serait pas la peine de travailler. Le boulot le plus important au monde qui est de guider bébé dans son entrée dans la vie ne vaut apparemment pas la peine de payer une personne très qualifiée, ou mieux, de s’y atteler soi-même. Mais puisque tout le monde fait ça, fabriquer un idiot supplémentaire à rajouter à la collection humaine ça ne peut pas faire de mal. Après tout il faut faire en sorte que bébé soit imprégné de la culture humaine de reproduction sans réflexion afin qu’il se reproduise à son tour et mette dans la poubelle Terre son propre rejeton.

Étrangement nous faisons tout pour contrôler la reproduction, viol interdit, avortement interdit après 12 semaines, publicité sur la capote et la pilule du jour et du lendemain, prévention du SIDA et autres MST, etc. tout en faisant en sorte de cacher l’inutilité de l’existence et son infinie dangerosité. Les philosophes sont muets sur le sujet, ou les profs de philo font tout pour cacher leurs débats hautement philosophiques sur la question préexistentielle, la seule pourtant qui a de l’intérêt. Ils ne parlent que de l’existentielle, et de la postexistentielle cette dernière étant totalement sans intérêt.

10 000 bonshommes sur la planète et l’aventure humaine serait garantie, la pérennité de l’espèce garantie, les guerres terminées, la faim on n’en parlerait plus, la souffrance serait minimale, la planète serait prospère, saine autant que faire se peut puisque les bestioles continueraient à se bouffer entre elles, les volcans à s’activer de rage, les tsunamis à noyer les plages, l’œil des cyclones à balayer le paysage, mais les hommes à être enfin sages.

Bon, bébé pousse, on ne l’appelle plus bébé, sauf sa mère qui l’appellera mon bébé jusqu’à 40 ans, elle en aura 73 ou 53, et alors bébé devra déjà s’habituer à sa disparition prochaine. Mais on n’en est pas là. De la même façon que maman ou papa a enregistré de force bébé dans la société sans son accord, elle l’enregistre de même force à l’école sans son accord. Il me semble que la Loi interdit de contraindre qui que ce soit à l’association forcée, mais bon, pour ce que j’en dis ! Puisque c’est pour son bien ! C’est bien l’école, on y apprend plein de choses, mais si on doit le faire c’est parce qu’on existe et pour faire comme tout le monde. Bébé est devenu Gamin.

Gamin poursuit l’aventure que papa/maman et la société complice lui ont imposée. Je croyais bêtement que ça aussi c’était interdit, impliquer une personne sans son accord dans une aventure plus que risquée. Avec Gamin c’est pire, car il a été mis devant le fait accompli de l’existence, sans aucune possibilité de revenir en arrière, et tant pis pour lui s’il vit une vie de merde dans des chiottes au milieu de détritus avec pour seule possibilité pour son avenir d’être petite main à 10 ans, ou de casser des cailloux au service d’un négrier. Il pourrait aussi tout simplement naitre handicapé. Mais alors à quelle aventure participe-t-il ? Il pourrait aussi naitre stérile. Mais alors à quelle pérennité participe-t-il ? Il pourrait tout aussi bien naitre légume physique et mental et tellement repoussant que jamais sa mère ne l’appellera mon bébé. Alors à quoi lui serviront-ils à maman papa et la société?

Voilà le soir, il est à peine 17h30. Le ciel est clair, mais l’environnement est brumeux. Il va faire froid, en dessous de zéro cette nuit. J’espère que Gamin est au chaud, parce qu’il en arrive un peu partout dans le monde des migrants, des gamins de tout âge que parents insouciants et nations imprévoyantes ne peuvent nourrir et qui cherchent une meilleure vie chez nous. Maman et papa n’ont-ils pas prévu toutes ces situations qui mettraient Gamin en péril alors qu’il n’a pas demandé à exister ? Il est peut être normal de faire un enfant, c’est la vie, mais n’est-il pas normal de tuer et de violer, et pourtant la plupart des personnes sur Terre comprennent ces interdictions morales, éthiques, et légales. Pourquoi mettre un enfant dans un berceau qui n’est pas le paradis ? Si vous êtes croyant pourquoi n’attendez-vous pas ce paradis auquel vous croyez pour faire des tas de rejetons ? Si vous n’êtes pas croyant pourquoi vouloir imposer à autrui ce que vous ne voulez pas qu’on vous inflige, vous handicaper de naissance, vous refiler un gène défectueux, vous installer dans un monde en guerre perpétuelle, etc. ?

Gamin a déjà appris ce qu’était la mort. Belle nouvelle, il sait maintenant qu’il est mortel, fragile, susceptible d’attraper n’importe quelle cochonnerie bactérienne ou virale. Il ne sait pas encore si papa ou maman lui ont refilé des gènes défectueux que ses grands-parents ont expérimentés, c’est pour plus tard quand ils oseront le lui avouer. 

Gamin est devenu Ado. Ses parents le préparent au choix d’une profession, mais pour quoi faire ? Lui, l’ado rêve d’aventure loin de ses géniteurs. La société est-elle une machine à rouages où Ado doit trouver sa place, quel rouage il représente ? Sommes-nous destinés à être un rouage par nos parents ? La vie est si courte que si l’on choisit la mauvaise voie c’est probablement pour la vie. D’où l’intérêt d’éduquer bébé aussi fraichement et justement que possible. Mais la chose mentale est si complexe. Qui sait la contrôler de l’extérieur ? C’est juste du bidouillage. Même les spécialistes se plantent dans les grandes lignes quand ils tentent d’éduquer un enfant. Et n’oubliez surtout pas que nous sommes innocents d’exister, innocents de notre corps et de notre intellect, et donc innocents de nos actions. Mais dans ce cas pourquoi sommes-nous éventuellement punis de nos actions antisociales ? Une correction d’éducation ne serait-elle pas plus juste ? Une remise en cause des éducateurs ne serait-elle pas préférable ?

L’école nous prépare à la concurrence, nous prépare à la bagarre comme pigeons et moineaux dans un bac à fleurs en hiver. Ne sommes-nous pas nés égaux selon les Droits de l’homme (et de la femme évidemment qui est née femme par hasard, quoique je me le demande encore.) Alors que signifie la concurrence ? Concurrence imposée alors que certains naissent incapables de s’opposer à quiconque, que d’autres naissent plus faibles physiquement et intellectuellement, que d’autres naissent encore dans des familles dorées à l’or fin parfaits tremplins pour la vie. Quel mérite a-t-on quand le hasard se mêle de bousculer tout pronostic ? Quel mérite a le pigeon de vaincre face au moineau ?

J’ai expérimenté 25 313 renouvèlements du matin. Aujourd’hui, un rhume carabiné accélère mes acouphènes. Le marteau piqueur n’a pas changé de rythme. Johnny est mort cette nuit suite à un cancer du poumon qu’il n’avait pas désiré, alors que ses parents l’avaient aimablement invité dans ce monde au milieu de la Seconde Guerre. J’ai tiré un bon lot à la naissance, mon corps est à peu près correct et mon intellect est ce qu’il est, je crois qu’il y a pire. Toujours, maman papa jouent à la roulette russe sur nos pauvres têtes et ça ne semble pas chagriner le monde. Les trois quarts des humains nés en même temps que moi sont déjà morts et souvent, très souvent, dans d’horribles souffrances quand ils ne sont pas nés handicapés, c’est-à-dire maltraités par maman dans son ventre pollué. Ceux qui comme moi ne sont pas morts ne vont pas tarder à subir parkinson ou alzheimer. Les seconds ont de la chance, ils finiront peut-être par oublier qu’ils existent. Quant aux parkinsoniens ils font naturellement le marteau piqueur, car les cachets sont toujours mal réglés, et c’est la pire torture qui soit. Je me demande si ma pauvre génitrice ne me l’a pas transmis, espérons que non. Dix années de tremblements, c’est bien pire que trois jours sur une croix, n’est-ce pas ? J’oubliais ma grand-mère maternelle morte du cancer vers 46 ans. Je préfère vous cacher l’écran de mes yeux et mes souvenirs car les annexes sont assez terrifiantes.

Ado gagne sa vie. Il est devenu Adulte. Mais pourquoi doit-il gagner sa vie, maman papa ne la lui ont-ils pas donnée généreusement ?

Adulte a lu ce texte. Il s’est juré qu’il ne ferait pas d’enfant. Mais il est amoureux…

Définitions


Un esclave n’est pas libre d’agir, il est sous la dépendance d’un maitre qui en dispose à son gré comme d’un simple objet. Un invité, il faut d’abord l’inviter aimablement, puis l’accueillir chez soi, dans sa ville, dans son pays, avec tout autant de respect pour passer du bon temps.

Alors, l’enfant que vous avez fabriqué est-il votre esclave ou votre invité ? Et vous-mêmes vous sentez-vous invité ou esclave des parents et de la société ?

Votre enfant est-il libre d’agir ? Pour cela il faudrait que le libre arbitre existe, que le cerveau ne soit pas une boite noire, et que chacun puisse choisir corps et intellect avant d’exister. Évidemment ça n’est pas possible. Supposons que vous soyez libre d’agir malgré toutes ces barrières infranchissables. Maman papa vous impose d’aller de A en B qui sont le début et la fin de vie. Quelle liberté à celui qui doit suivre le chemin qu’on lui ordonne ? Quelle liberté a celui qui doit obéir aux ordres de son corps ? L’estomac à remplir quotidiennement ainsi que les poumons d’un bon air bien pur de préférence pour maintenir l’actif. Je connais même des gens qui prétendent aimer l’exercice douloureux de vivre qu’on leur a imposé. Ce serait incompréhensible si l’imprégnation n’était pas la règle du fonctionnement de notre système mental né vierge de toutes connaissances et significations culturelles.

Votre enfant est-il sous la dépendance d’un maitre? Bien sûr, il en a même plusieurs comme on l’a vu plus haut, et à commencer par vous-mêmes ses parents. L’accueil de ces maitres est tellement menaçant. Ils emploient la police armée, la Justice et ses prisons, les contraventions, les huissiers. Et toutes ces gentillesses dès votre apparition dans ce monde. Aussitôt intégré aussitôt menacé. C’est un chantage permanent. Quel accueil pour un invité !

Votre enfant est-il un objet ? Il suffit de voir le début de vie d’un nouveau-né. Bébé est trimbalé comme tel. Gamin fait ce qu’on lui dit, éducation obligatoire. Ado commence à réclamer le large, mais est prisonnier du social. Adulte rentre dans le rang et bosse. Retraité est esclave de son propre passé social.

Vous ne vous sentez pas le négrier de votre enfant malgré ces remarques ? C’est pourtant pour votre propre service que vous l’avez fabriqué, certainement pas le sien puisqu’il n’existait pas et qu’après un temps de vie très court il retournera à la non-existence, particules éparpillées. La majorité des humains intègrent la société dans laquelle ils sont nés, et participent comme rouage national par impôts et taxes à faire vivre les autres associés et à payer les retraites.


Invité, non, je n’ai pas été l’invité de ce monde.


Quoi d’autre ? À vous de me le dire…


Pourquoi conter tout ça, ce qui n’arrangera pas l’ambiance délétère constante de la planète ? Dites-moi comment faire pour prévenir tout ce gentil peuple d’impensants sans le leur seriner quotidiennement, alors que tous les jours naissent plus de 350 000 bébés innocents, innocents ce jour et tout au long de leur vie d’humains ?


Fin - E. Berlherm




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