Nous
savons tous que nos
lois sont artificielles, c’est-à-dire qu’elles sont fabriquées
par les hommes pour gérer les hommes. Mais
il y a également des lois naturelles qui sont ce que le corps nous
commande. Ce
sont pour
les plus évidentes, respirer, boire,
manger, déféquer, dormir et
je rajouterais nos faibles capacités musculaires et intellectuelles
comparées à…
qui
vous voulez de bien meilleur que soi dans le règne animal ou
imaginaire.
Quelle
raison a une loi sociale ? C’est simple, cela signifie qu’il
n’est pas naturel de faire ce que la loi vous commande, sinon elle
ne serait pas nécessaire. Par exemple, comme dirait le monarque du
Petit Prince, « je vous ordonne de respirer. » Il faut
donc brider les récalcitrants. Les gouvernants aiment brider, c’est
la seule manière qu’ils ont de montrer leur pouvoir. Exemple de
loi stupide, « je vous ordonne de vous lever et de vous coucher
quand je le décide, c’est moi qui commande. » Il s’agit
de la loi sur le changement d’heure qui ne sert à rien d’autre
que montrer la puissance du gouvernant sur tout le petit peuple.
C’est la seule loi qui implique tout le monde sans qu’aucun
puisse y échapper.
Supposons
que vous fassiez un enfant librement, handicapé
ou non vous et lui, orphelin ou non vous et lui
(être handicapé ou
orphelin et faire un
enfant est tout à fait aberrant, plutôt immonde c’est-à-dire une
saloperie innommable, car
vous savez que ça peut lui arriver et ça n’a pas l’air de vous
poser le moindre souci.)
Vous le fabriquez donc
en toute connaissance de cause et d’effet sur
le pauvre morpion avec
l’aval tacite de vos associés concitoyens.
Vous infligez l’existence à votre enfant, qui est une personne
tout comme vous,
ainsi que les commandes de la Nature. (Si
ça ne vous chagrine pas de donner des ordres, cela implique que vous
acceptez les ordres, pourtant je sais par ouï-dire que vous ne les
aimez pas beaucoup.) Ces
ordres sont vos ordres puisque la procréation de votre enfant est
volontaire et que vous
espérez que le petit sera aussi parfait que possible… après vous
être regardé dans un miroir en
excluant les accidents courants qui surgissent dans la vie
inopinément. Votre
enfant n’est pas encore sorti du ventre de sa mère, vous
peut-être, que vous lui donnez des ordres (vous
peut-être si vous n’en êtes pas mortes),
à commencer par celui d’exister. L’enfant va ensuite passer ses
18 premières années à subir vos autres
ordres et
apprendre les lois sociales avant d’être lâché comme associé à
part entière dans le
bouillon de culture.
J’espère que vous ne
vous êtes loupé nulle part. Dix-huit ans c’est beaucoup, et c’est
aussi la preuve qu’il est très compliqué d’insérer une
personne dans le monde, puisqu’il faut près d’un quart de sa vie
(de riche occidental
sinon ce sera 1/3 ou 1/2 voire moins) pour
lui inculquer l’essentiel. Quant
à moi, je n’ai toujours rien compris à
la société qui refuse de comprendre ce qu’est un être humain, là
où je ne vois aucune difficulté !
Je vous rappelle que
cette personne n’a pas fait la demande d’exister, tout comme vous
d’ailleurs, ce qui ne vous donnait pas l’autorisation de lui
infliger la même peine, au pire ou au mieux vous auriez pu vous
« venger » sur vos géniteurs. Esclaves
d’esclaves d’esclaves d’esclaves d’etc.,
ainsi sommes-nous.
Pour
l’instant je ne vois pas à quel moment votre enfant aurait pu
acquérir la culpabilité d’une quelconque de ses actions, même si
cette action ne vous enchante guère et contrevient aux lois
sociales. À mon humble avis si la/le Frankenstein and Co que vous
êtes s’est planté dans la fabrication ou l’éducation du
mouflet, le blâme vous revient. Personnellement je vous l’ai
octroyé, ce blâme, dès que vous avez manifesté l’envie de
copuler pour donner naissance à… personne ne sait quoi à
l’avance. Bon, en tant qu’animal que nous sommes tous je vous
pardonne, et en tant qu’associé citoyen esclave quasi humain, je
vous désapprouve totalement, car vous ne m’avez même pas demandé
mon assentiment que je ne vous aurais pas accordé de toute façon,
la vie étant bien trop dangereuse et surtout absurde pour être
vécue. Passons.
Aujourd’hui
l’enfant français ne subit pas le service militaire, ce qui fut
mon cas. Mineur jusqu’à 21 ans, j’étais donc enfant soldat. Ils
m’apprenaient à accepter la mort violente, et à la donner sans
remords. J’étais un des moutons esclaves de service apprenti tueur
de moutons adverses. Tiens, il y a des adversaires dans le jeu de la
vie ! Chouette, heureux de l’apprendre ! Le monde où
vous m’avez balancé n’est donc pas sain ? Et vous dites que
vous m’aimez ? À l’époque j’étais un mouton domestique
inconscient, formaté à l’obéissance, ils pouvaient me faire
accepter n’importe quoi. Mes parents étaient de parfaits associés
concitoyens fabricants d’esclaves moutons à la chaine, baby boom !
En contrepartie du boum nucléaire de Hiroshima/Nagasaki et du
pilonnage de Dresde à rendre sourds les morts déchiquetés
eux-mêmes. À deux mois près, j’allais au Tchad participer à la
surveillance de ces bandits d’Africains toujours prêts à en
découdre avec les gentils colonisateurs (GC). Seize mois
d’emmerdements maximum comme dirait la loi de Murphy, encore une.
Suis-je coupable de quelque chose ? Ai-je acquis un potentiel de
culpabilité qui annule mon innocence d’exister tel que je suis à
la demande parentale et sociale, parents et sociétés incapables de
contrôler ce qu’ils font ? Je n’en ai pas l’impression.
Cherchons
plus loin où cette culpabilité d’exister qui transcenderait
l’innocence d’exister peut bien se cacher.
Sais-tu
qu’ils t’ont fabriqué avec un sexe ces couillons ? C’est
sérieux le sexe, regarde plus bas, entre tes jambes, ça s’ouvre
ou ça se brandit, c’est selon. C’est tellement sérieux qu’il
y a plein de lois sur le sujet. Il y a même plein de films dans la
loi et hors la loi. Pourtant cette chose les parents ne t’en
parlent pas, ou à peine, ils n’osent pas, alors qu’il a bien
fallu qu’ils pratiquent assidument pour te contraindre à exister.
C’est plus sérieux que la nourriture le sexe, c’est plus grave
pour autrui, mais ils te parlent de bouffe trois étoiles à longueur
de journée et jamais de libido, jamais de copulation, jamais
d’intromission, jamais d’orgasme, jamais d’érection, jamais de
maladie sanguine chronique. Tu apprendras la chose par surprise, un
gourdin s’est dressé, le sang dégouline. Es-tu coupable quelque
part de posséder l’existence et ces ordres du bas-ventre pas plus
désirés que la vie elle-même ? T’ont-ils bien appris ou mal
appris à contrôler tes pulsions ? Es-tu coupable de tes
hormones, de posséder des hormones ? Je ne vois toujours pas où
la sexualité pourrait me rendre coupable plus qu’ailleurs.
Mais
au fait comment t’apprennent-ils les choses tes éducateurs ?
Par quel moyen astucieux gribouillent-ils dans ton cerveau les
messages de leurs lois ? Sache d’abord que la masse de
neurones qui grésille entre tes oreilles tu l’as obtenue avec tout
le reste, et sans aucune garantie du constructeur, c’est-à-dire
Maman aidée, très peu, de papa. Tu n’en es pas responsable. C’est
là-dedans que l’essentiel de notre humanité se passe. Au départ
c’est comme un dico blanc sans rien écrit de culturel dedans, sans
aucune définition, sans aucune connaissance, sans aucune
signification, car le cerveau sera un dico qui va te donner tout à
la fois information, signification, et commande corporelle, puis
aussi les rêves et tout ça, les hallucinations, les croyances, et
encore tout le reste. Mais c’est censé devenir une sorte de dico,
ou plutôt une encyclopédie brouillonne sans signature. Tes
éducateurs comme toi-même vous n’écrivez rien dans ce bouquin,
ça se débrouille tout seul. Tes yeux sont ouverts, clic comme des
caméras, ça enregistre on ne sait pas quoi ni où ni comment. Tes
oreilles, micros, elles, sont toujours en éveil, sinon il faut
mettre des tampons pour les obturer, mais ça fonctionne quand même.
Comme pour les yeux le cerveau s’active en continu, on ne sait pas
ce qu’il fait, mais en général ça se débrouille, et papa maman
sont contents de toi quand tu répètes « parallélépipédique »
sans faute ou « maman » c’est plus facile. Ils font
comme si c’était toi l’opérateur de ton propre cerveau. Tu vas
vite devenir un génie, quand tu n’es pas autiste. Pour la suite
des milliers de mots, de millions d’actions, tout se passe de la
même façon, et c’est d’autant plus de la bidouille, qu’il y a
de choses enregistrées sans que tu y sois pour quoi que ce soit. Tu
n’es toujours pas responsable d’exister, n’est-ce pas ?
Alors pourquoi serais-tu coupable d’une action commise par un truc
qui fonctionne tout seul et que tu n’as pas fabriqué, c’est-à-dire
toi-même en chair et en os ?
Et
pourtant, fais gaffe aux punitions. Tu n’as pas demandé à
exister, mais les torgnoles peuvent se succéder, les brimades, les
privations de dessert, la geôle, le bagne, Cayenne, de nos jours
c’est le portable confisqué ou la console, l’argent de poche
supprimé. Ils sont fort les parents pour te culpabiliser alors que
tu n’es pour rien dans ce jeu de la vie ce jeu de société
stupide. Mais puisqu’on leur a fait la même chose, ils répètent
bêtement, c’est normal. Qui va briser l’enchainement des
stupidités ? Moi moi moi moi MOI, mouah…
Les
parents t’ont appris le système punitif. Il est bien ancré en
toi, et tu crois qu’il est juste, que ta conduite doit être
méritante, sans faute. La société prend alors le relai des
punitions. Elle est complice du crime de la fabrication de ton
existence, mais jamais elle ne se punira elle-même des erreurs de
fabrication et d’éducation. Car elle aussi elle éduque sans
savoir comment, et te punis que tu n’en sache pas plus qu’elle
sur « comment as-tu pu déconner alors qu’ils sont si bons
avec toi de prendre soin de toi ? » La société t’apprend
à dire « je » et à prendre la responsabilité de ce
corps qui a pour étiquette « je » (le patronyme que la
société t’a donné), alors que la chose fonctionne toute seule.
Toutes les cellules qui te composent, les milles milliards et les
autres, sont toutes des automates qui n’ont aucune idée de ton
existence, elles fonctionnent pour elles-mêmes, aussi égoïstement
que chaque système vivant sur la planète et ailleurs. Or tu es le
résultat des activités de ces cellules et du reste. Et tout ça t’a
été imposé avec le démarrage de la fabrication de ton existence
par la joyeuse copulation de tes parents, par la division (la
multiplication) d’un ovule fécondé. Es-tu responsable de cet
ovule débonnaire, de ce spermatozoïde vif et musclé qui se fraie
un chemin à travers la membrane ? À quel moment deviens-tu
responsable d’exister ? À quel moment ton éducation
prend-elle le pas sur ton innocence d’exister ? À quel moment
le « logiciel » que tes éducateurs ont tenté
d’installer en toi devient-il ta responsabilité d’être ce qu’il
est ? Oui, tu es tout ça, ce corps et cet intellect, mais tu
n’y es pour rien. Et quand tu dis « je », c’est la
chose mentale, le logiciel acquis, qui active ta bouche imposée et
te fait dire « je ». Et c’est elle, ma propre boite
noire mentale, qui me fait écrire tous ces mots, et je ne sais
toujours pas pourquoi j’en suis arrivé là…
Y
a-t-il une loi que l’on connaitrait avant notre naissance qui
proclame qu’une nouvelle existence doit respecter des lois qu’elle
n’aurait pas signées avant d’exister ?
Tu
n’es coupable de rien puisque tu n’es pas responsable d’exister,
ni d’exister tel que tu es. L’innocence
de l’existence englobe toute ton existence du début à la fin, ce
qui mécaniquement englobe l’univers,
lui-même innocent d’être.
Nous
sommes coupables quand nous dérogeons aux lois sociales. Nous sommes
malgré cela innocents quand les lois sont illégitimes. Tous les
coupables légaux sont enfermés illégitimement, car nous sommes
tous innocents d’exister.
Innocent
ou coupable ? Le juré que je suis affirme notre innocence.
Fin
- E. Berlherm
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